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Le 24 novembre 2009, la circulaire dite Besson était publiée pour soi-disant répondre aux exigences des travailleurs sans papiers engagés avec les syndicats et associations du « groupe des 11 » dans un mouvement de grève depuis le 12 octobre 2009. Cette circulaire ne réglait rien. Le mouvement de grève allait durer des mois.

Sous la pression de ce formidable mouvement social, le gouvernement Fillon avait fini par concéder, à partir du 18 juin 2010, des critères de régularisation, qui ont été qualifiés « d’avancée significative » par le « groupe des 11 ». Sur cette base, des milliers de travailleur-e-s sans papiers ont été régularisés, et cela malgré les reniements gouvernementaux et les atermoiements préfectoraux.

Aujourd’hui, c’est cette « avancée significative » qui constitue l’essentiel de l’architecture et des paragraphes consacrés à l’admission au séjour des travailleur-e-s en situation irrégulière dans la circulaire publiée le 28 novembre 2012 par le ministère de l’Intérieur.

La CGT a, dans son communiqué du 19 novembre 2012, salué le fait que, pour la première fois dans notre pays, une réelle concertation entre le ministère du Travail, le ministère de l’Intérieur et les organisations syndicales et patronales a eu lieu pour traiter de la question de la régularisation des travailleur-e-s sans papiers. Cet acte positif « reconnaît à juste titre que les salariés sans titre de séjour valable sont des salariés à part entière et qu’ils doivent être mis sous la protection du droit social conquis par des décennies de lutte sociales, ceci d’autant plus qu’ils sont de ce point de vue les plus vulnérables ». La prise en compte de la situation spécifique de ces salarié-e-s, qui ne prennent le travail de personne, est devenue incontournable, tant de la part des autorités publiques que de l’ensemble du monde du travail.

Une circulaire, quelle qu’elle soit, n’est qu’une circulaire. Il sera évidemment nécessaire, au plus vite, de modifier le Code d’entrée et de séjour des étrangers (CESEDA) et le Code du Travail.

Ceci étant, cette nouvelle circulaire formalise la plupart des acquis du mouvement des travailleur-e-s sans papiers et va dans le sens de plusieurs revendications posées par les syndicats et associations groupés au sein de la « plateforme 12 » :

- les travailleur-e-s algériens et tunisiens peuvent bénéficier des dispositions contenues dans la circulaire.

- la régularisation des travailleur-e-s est maintenant possible quel que soit leur métier.

- la durée de présence antérieure demandée passe de 5 ans à 3 ans pour ceux des salariés qui ont pu accumuler 24 mois de travail, dont 8 dans les 12 derniers mois.

- le contrat de travail se poursuit pendant la durée de l’instruction de la demande.

- une activité professionnelle antérieure à mi-temps est recevable.

- les chèques emploi service universels sont pris en compte comme preuve de travail.

- plusieurs contrats de travail sont admis pour atteindre globalement un smic mensuel.

- les cartes délivrées ne sont plus limitées à une zone géographique donnée.

- lors du renouvellement du titre de séjour, il est admis que le salarié ait pu changer d’employeur.

- la régularisation des travailleurs intérimaires, avec des critères concernant des engagements de travail assouplis, s’impose à l’ensemble des préfectures.

Mais, maintenir d’une façon générale une durée de présence de 5 ans, voire de 7 ans pour permettre à ces salariés d’être régularisés, laisse aux employeurs une main d’œuvre dans une situation de subordination exorbitante pendant de longues années. De même, maintenir la nécessité « d’une maîtrise orale élémentaire de la langue française » ou faire porter au salarié et non pas à l’employeur la responsabilité du non respect « des conditions de travail et de rémunération » pour renouveler le titre de séjour, est contreproductif pour « mettre fin à des abus inacceptables ».

De la même façon, rien n’est envisagé pour celles et ceux qui sont contraints de travailler au « noir », alors que les expérimentations construites depuis 2010 suite à « l’addendum » ont montré leur efficacité tant sociales qu’économiques. Ces travailleur-e-s ne demandent qu’à cotiser. Pour mémoire, dix mille travailleur-e-s nouvellement déclarés, ne serait-ce qu’au SMIC, apportent plus de 28 millions d’euros aux comptes sociaux.

Enfin, dans ce texte, rien non plus pour les grévistes qui, tout au long des années Sarkozy, ont lutté et fait grève avec courage et détermination pour arracher leur régularisation et celle de leurs camarades, et qui ont été laissés de côté ou exclus du processus de régularisation du fait de consignes données à leur encontre par les précédents gouvernements.

Il existe aujourd’hui en France, comme dans toute l’Union européenne, un marché du travail autour de 3 euros de l’heure, avec des travailleurs sans droits, mal déclarés ou « au noir ». Il va de pair avec la recherche constante du moins disant social et la course à l’exonération de cotisations sociales.

Il est essentiel de régulariser les travailleurs sans papiers tout en faisant en sorte que leurs employeurs respectent les normes sociales françaises. C’est, enfin !, reconnaître l’apport courageux de ces salariés à l’économie de notre pays. Et c’est aussi combattre le dumping social.

Alors, Mesdames et Messieurs du gouvernement, encore un effort !

Montreuil, le 30 novembre 2012

Tag(s) : #Interpro
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